Gris, le temps était lourd aujourd'hui. Septembre nous annonçait bien que l'été était terminé. Le soleil ne serrait plus aussi présent qu'avant. L'automne et la pluie arrivait. La météo, je me concentrais sur elle pour ne pas penser à l'endroit où mes pattes et mon passé m'avait ramener. La savane. C'est là que tout à commencer. Je m'en souviens comme si c'était hier. Psychose, ce démon blanc et mon père. Allongé sous lui, gorge à découvert. Psychose qui plante ces crocs. Je lache une jappement alors que mes griffes s'enfoncent dans le sol. Les souvenirs. Foutus souvenirs. Foutus passé. Je me suis arrêter. A l'endroit même où il est mort. Je reconnais encore la petite pierre derrière laquelle je m'étais caché pour voir tout cela. Mes yeux gris parcourent la savane, les brins d'herbe plient au grès du vent, je lève la tête pour le sentir contre mon museau, cette odeur. Le passé surgit. Pour le meilleur ou pour le pire.

De nouveau je pousse un soupir. Pourquoi je suis revenu ici ? Pourquoi ce maudit instinct m'a trahi pile au moment où j'avais besoin de lui. Je déteste cette endroit. Je déteste cette terre. Je déteste les loups qui la foule chaque jours. Je déteste toutes ces meutes en particulier la sienne. Le démon blanc, c'était comme ça qu'on l'appelait. Je suppose que c'est toujours comme ça qu'on l'appelle. Le vent, mon tendre ami m'envoie une tonne d'odeur dans la face. Comme un retour en arrière, la rivière rouge pue toujours autant. L'odeur métallique et cuivré du rubis rouge liquide me prend au tripes. Il a coulé, encore. Mon père était loin d'être le dernier. Saphir. Saphir a saigné. Même après tout ce temps, toute ces années, je me souviens de leur odeur a eux tous. Ridge, il est toujours là lui aussi. Vu ce qu'il dégage c'est devenu un mâle. Sans doute, un foutu mâle, un peu comme son père. J'espère juste que niveau caractère il ne se ressemble pas plus que ça. Et merde. Cette odeur. Entêtante, cette odeur. Un grognement vient naitre dans ma gorge. Lui. Je ne peux contrôlait mes muscles qui se bandent en sentant qu'il est là tout près. Mon poil se hérissent. Psychose.
Passé. Meurtre. Cauchemar.

Je t'attendais. Démon.

Le passé, beaucoup s'en servent pour améliorer un futur incertain. Les erreurs de ce "passé" servent à ce qu'on évite de les refaire dans le "future". Mais certains, perdu, têtus, stupides, ne comprennent pas l'origine des souvenirs, des douleurs d'antan. Pour eux, le passé ne sert qu'à souffrir et n'est donc pas la leçon de la vie. Certains sont, assurément, plus stupides que d'autres.
Psychose, lui, se voyait être entre ces deux groupes. Le passé, il en avait tiré beaucoup de conclusions, il avait évolué. Pas toujours en bien, mais il s'était servit de ses erreurs d'autrefois pour affronter le présent avec plus de sagesse. Cependant, malgré la meilleure volonté du monde, il est certaines choses qui brisent les résolutions, les espoirs, qui anéantit la sagesse. Pour le mâle blanc, une simple odeur avait suffit.
Au départ, il avait cru à une hallucination olfactive. Un délire de son esprit, né de ses nombreux souvenirs. Mais il n'y avait pas cru longtemps, l'odeur étant trop entêtante, trop réelle. Il avait alors douté, avait vu une scène qui, sans qu'il ne l'avoue jamais, l'avait choqué. Il avait fermé les yeux, revoyant un loup qu'il pensait disparu à jamais. Mais en les ouvrant à nouveau, il se rendit compte que l'odeur n'était pas la bonne, ce n'était pas la sienne. Elle lui ressemblait, assurément, mais ce n'était pas la même. Une odeur teintée de cet ennemi que le loup blanc respectait, mais pourtant tellement différente qu'elle en était écoeurante. Ecoeurante dans tout ce qu'elle signifiait.

Dans un soupir, Psychose se fit une raison. Il commença alors une marche, calme et assurée, vers la savane d'un territoire qu'il n'avait jamais apprécié. Il savait ce qu'il allait voir en se rendant là-bas. Il n'en était pas heureux. Mais il préférait affronter ce fantôme au plus vite, pour en être plus vite libéré.
Son allure augmenta et c'est bien trop vite à son goût que son ombre blanche se détacha du ciel, fixant la silhouette proche d'un mâle qu'il avait connu louveteau et qu'il reconnaissait pourtant. Un instant hésitant, il se ressaisit et fit un pas en avant. Tête haute, regard et posture fière, il mima un loup qu'aucun regrets ne blessait. Il mima un loup dont tout ses actes étaient sa fierté et ce fut d'une voix vide de tout qu'il prononça un mot, un nom qui voulait tout dire.

" Explicit."

Il se souvenait de ce louveteau. Et, douleur, qu'il ressemblait à son défunt père ! Seule Tia savait à quel point la mort de Khamsin avait été douloureuse pour Psychose, qui avait alors du dire adieu à des habitudes qui lui étaient chères. Le temps avait calmé le vide de cet adversaire, qu'aucun autre n'avait jamais égalé. Mais revoir son fils ouvrait une petite part de cette blessure. Il revoyait Saphir, détruite, sa douleur, sa solitude ... Et sa culpabilité.